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zalandeau3

4 avril 2023

Mon Indochine

GSM

Écrit le 17 février 2009
 
Nous marchions sur le trottoir de la rue Catinat. Il faisait très chaud. Les semelles de crêpe de nos souliers collaient sur le sol brulant. L’homme qui me tenait la main était aussi bronzé que j’étais pâlot… Il s’appelait Henri… Ce qui me frappait, c’est qu’il n’était pas habillé entièrement de blanc, comme les autres européens, ni comme les Vietnamiens plutôt culottés de noir… A part sa chemisette blanche, tout était à l’avenant : Short beige, chaussettes de couleur et chaussures noires… J’étais très content de me promener avec cet homme dans cette rue de Saïgon. Ce n'était pas n’importe qui, c’était mon Papa…
 
J’avais passé ces derniers mois à l’hôpital pour vaincre ce ver qu’on disait solitaire puis ensuite la dysenterie, la jambe suspendue en l’air, avec un petit tuyau ou je voyais couler le liquide transparent, goutte à goutte… Bien sur, ma Maman et mon Papa venaient me voir le matin, le soir et toute la coupure consacrée à la sieste, qu’ils me consacraient…
Je n’étais encore pas sorti en ville depuis notre arrivée dans ce pays si chaud… J’étais si content de donner la main à mon Papa. Il me parlait. Je ne sais plus ce qu’il me disait, mais j’écoutais et il me rassurait.
 
Nous nous dirigions vers la cathédrale après avoir déambulé dans le boulevard Charner…
Avisant un marchand ambulant, il m’offrit une glace que je ne mis guère de temps à laper, tant j’étais assoiffé…
Nous avions à peine repris notre chemin qu’un photographe nous prit en photo. Papa mit le ticket dans sa poche…
Notre séjour dans la cathédrale me parut très court, lorsqu’il fallu ressortir dans la chaleur étouffante de la rue Catinat… 
 
Nous retournâmes sur le quai du commerce, où nous attendait la moto de Papa. Nous fîmes un crochet pour prendre Maman à la sortie de son Bureau, qui me couvrit de gros bisous et me donna un bonbon au citron. Bien calé entre mon Papa (dont j’entourais la taille de mes bras) et ma Maman, nous reprîmes alors la route de Cholon pour rentrer à la maison.
 
Ce soir là, j’étais très fatigué et je ne mis pas longtemps à m’endormir dans les bisous de mes parents…
 
Cela se passait en 1954...
      

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29 août 2022

Souvenirs d'enfance

GSM

– 14:18:33

Quand j’étais petit, à Saïgon, où nous étions partis, Sur les vingt mois de présence dans cette Indochine envoûtante, j’ai bien dû passer trois ou quatre mois à l’hosto. J'avais quatre ou cinq ans...
J’y suis allé pour une dysenterie puis retourné pour le ver solitaire (je ne sais plus dans quel ordre).
Je ne me souviens plus du mauvais coté des choses.
Je me souviens des tuyaux qui étaient branchés sur un bras ou une jambe, certainement pour me nourrir.
A l’époque on connaissait la pénicilline, mais pas plus. Et donc les maladies étaient longues à guérir.
Ce que je garde en mémoire, c’est que chaque jour, mon Papa et ma Maman qui travaillaient, venaient chacun trois fois par jour me voir à l’hôpital.
Il paraît que j’étais maigre et qu’ils avaient très peur pour moi, mais ne l’ont jamais laissé paraître… Ils me faisaient pleins de bisous…
En repensant à l’amour de mes parents, mon émotion est encore intense.
Leur amour me manque encore...
       
4 juillet 2021

Un homme de bien


GSMEcrit le 4 mai 2009

Il me faut laisser une nouvelle trace formelle, de cet homme formidable qui a rempli mon enfance…
 
Nous sommes allés à Saïgon de 1954 à 1955.
Terre colonisée par les blancs, où la France et l’Indochine ont cohabités dans un rapport de dominant à dominé…
Certes, bon nombre de fonctionnaires de l’administration coloniale s’acquittaient de leur tâche, sans animosité envers les autochtones. Certes, bien des religieux et des hommes de bonne volonté ont contribué à la compréhension mutuelle des deux peuples.
Mais dans un pays où la couverture sociale était l’apanage des colons, dans un pays où les petits chefs Français, devenaient soudain des contremaîtres avec des pouvoirs illimités, dans un pays, où l’accaparation des richesses se faisait sans vergogne, la morgue de certains a précipité l’indépendance.
L’arrogance de cette grosse minorité de blancs, minables en France, devenus tout-puissants en Indochine, certains d’une légitimité, que la démocratie à deux vitesses leur accordait implicitement, a mené cette région comme toutes les autres à la haine, au rejet et à la guerre.
Les chantiers navals de Saïgon n’échappaient pas à cette règle de domination.
 
Les coques des bateaux mis en cale sèche, étaient calfatées et repeintes sur un budget défini par la société Denis-Frères, par des équipes de coolies aux ordres de contremaîtres qui empochaient parfois négligemment une partie des payes destinées à leurs « esclaves ».
Ces chefs au pouvoir divin allaient au cinéma, à la piscine ou pratiquer le tennis, laissant à un cabot (caporal), c'est-à-dire un coolie un peu moins mal payé, la responsabilité du chantier…
Ils venaient chaque vendredi soir distribuer la paye, avec toujours quelques griefs fallacieux, permettant de réduire le montant de l’aumône versée en liquide.
 
Un homme, n’a pas voulu entrer dans ce système arbitraire. Partant du budget alloué par l’entreprise de carénage, il faisait bloquer 20%, en provision dans la caisse de l’entreprise, avec plusieurs coolies représentants leurs collègues comme témoins visuels.
Puis il annonçait à son équipe, combien d’argent ils allaient toucher chacun (sans absence), pour l’ensemble du travail exécuté dans les règles de l’art.
 
Ses équipes furent rapidement celles qui exécutaient le meilleur travail, dans des délais records et qui gagnaient le plus de tout l’arsenal.
 
Quand au 20% ? C’était le système de « sécurité sociale », que cet homme avait improvisé. Quand un ouvrier était malade ou blessé et bien évidemment sans revenu, ce contremaître allait porter généralement à la femme ou à la famille du coolie, un peu de cet argent de la cagnotte, pour subvenir aux besoins et aux soins.
 
Il poussa, ce processus plus loin, lorsqu’il s’aperçu que la majorité des ouvriers dépensaient leur paye dès le vendredi soir en beuverie et au jeu…
Pour les coolies mariés, il versât alors la paye à leurs épouses, qui en faisaient meilleure gestion…
 
Ce contremaître était aimé de ses ouvriers et en voici la preuve…
 
Harcelé pour ses procédés anticonformistes et poursuivi par la jalousie haineuse de ses pairs, il quitta l’arsenal pour une place de gérant des cinémas de Saïgon, dont son demi-frère Léon était le propriétaire. La partie dangereuse de ce métier était le transport quotidien des recettes vers la banque.
Un jour ce qui devait arriver, arriva… Porteur d’une grosse recette, cerné par une cinquantaine de coolies, matraque en main, il se préparait à vendre chèrement sa peau…
 
Quand soudain, un de ses nombreux ex-employés de l’arsenal passa par là. Celui-ci s’adressa à la meute d’assaillants et leur dit simplement : « Lui, chef très bon avec nous et très juste ! ».
En quelques secondes la ruelle fut déserte et mon père acquis davantage de renommée et de sécurité… Oui ! L’homme dont je parle… était mon père… Un homme sensible, fort, juste, intègre et surtout humain…
Il avait compris que ce peuple en souffrance n’était pas sauvage et barbare, mais reconnaissant et sentimental, pour peu qu’on lui accordât un peu de dignité et d’intérêt !
 
Si nos « colons » avaient eu le dixième de cette humanité, l’indépendance se serait déroulée sans violence, dans la paix et la coopération…
 
Mais le genre humain est ainsi fait, qu’il génère la violence par son iniquité et son dédain…
 
C'est un autre épisode de la vie de mon père, ce héros de l’ombre, mais qui sera pour toujours dans la lumière de mon cœur !
  
3 juillet 2021

Mémoires et radotages (354) – La vie de Papa – complément n°2

 

GSM

Écrit le 29 juin 2021

Ensuite… Quand ? Disons, quand la ligne de démarcation fut établie, mon père est rentré chez lui en Normandie, parce qu’il n’avait pas de foyer dans le midi de la France, parce que les restrictions étaient plus fortes qu’en Normandie région de culture, d’élevage et où on peut toujours trouver à manger… Sa nourrice (celle qui était si gentille) était morte… Et hélas son curé ainsi que son instituteur (Mr Fromage), auxquels il avait promis de leur casser la gueule, étaient morts…

Où habita-t-il ? Je ne sais pas. A Heugueville sur Sienne probablement… Mais toujours est-il que pour faire échapper les jeunes adultes au STO (Service de Travail Obligatoire) en Allemagne, la mairie créa entre autres, des postes de gardes du pont de la Roque… Ainsi Papa garda-t-il ce pont dans une guérite, habillé en militaire Français avec fusil, casque…

Il passait le plus clair de ses nuits à roupiller en espérant que les alliés ne débarquent pas et ne lui fassent pas la peau !

………………..

Il joua au foot dans l’équipe du CS Coutançais. Il entraîna André Lerond, (joueur moyen dira mon père) et qui fera une carrière professionnelle plus tard.

Papa joua ensuite au petit Quevilly (près de Rouen) du temps ou ce club était en première division…

Il fit du marché noir entre la Normandie et Paris et se fit beaucoup d’argent (il se payait des costards de soie, alors que tout était rationné)… Il gagnait en trois jours ce que ma mère secrétaire gagnait en un mois...

………………..

Il fut rappelé à l’activité militaire le 20 février 1945 et affecté à la compagnie de port à Cherbourg… Il convoya des véhicules militaires de toutes sortes du port de Cherbourg jusqu’au front, soit par chemin de fer, soit par la route. Il fut renvoyé dans ses foyers le 10 septembre 1945 en vertu du décret de démobilisation du 26 août 1945. J’ai des photos le montrant en uniforme Anglais

Quand Papa connu-t-il Maman ? Je crois que c’est avant cette re-mobilisation…

Ils habitèrent ensuite à Paris, rue de Lourmel. Papa fit l’AFPA et décrocha le CAP de peintre –tapissier - peintre en lettres. Papa joua au foot au Red Star…

Ils se marièrent en 1946… Il avait beaucoup de chantiers de peinture (c’était la période de la reconstruction). J’étais encore petit (en 53, environ), et j’étais sur la touche le dimanche pour le regarder jouer), quand il cessa son sport, parce qu’il arrivait toujours en retard à cause de Maman qui nous mettait tout le temps à la bourre…

Puis il apprit le décès de ses deux frères Jean et François, probablement en 1953, dont la moto avait été renversée à Saïgon par un véhicule militaire…

Mes parents vendirent camionnette, meubles, vaisselles et nous partîmes pour Saïgon… Papa me raconta plus tard qu’il voulait venger ses deux frères… (Il n’y parvint jamais… L’armée ne délivre pas les coordonnées de son personnel comme ça…).

Nous sommes restés environ deux ans à Saïgon. Papa fit deux métiers : D’abord il travailla chez Denis Frères où il fut contremaître pour radouber les bateaux en cale sèche, puis gérant de la chaîne de cinémas qui appartenaient tous à Léon. (Celui-ci, milliardaire, détenait en outre les droits d’importation exclusifs de tous les appareils électroménagers de l’époque. Il prenait l’avion tous les week-ends, pour aller à Dauville, jouer au casino ! Mais il ne prêta jamais un centime à mon père, qui était pourtant son demi-frère !)

La chute de Diên Biên Phu se situe en mai 1954… En 1955, les Việt Minh commençaient la guérilla, uniquement de nuit, dans les faubourgs de Saïgon. Nous habitions dans le « quartier Chinois », rue Jean Eudel… Les balles traceuses passaient au-dessus des toits et Papa montait sur les tuiles pour tenter de voir d’où cela provenait… Au petit matin la contre-attaque s’opérait et on voyait une colonne de chars (probablement des M24 Chaffee) passer dans la rue. Il y eu trois nuits successives de mitraillages… Il n’y en eu pas de quatrième… Nous étions dans l’avion (Super Constellation) du retour… Paris-Orly, puis logés chez Pépère et Mémère à Paris rue Saint Dominique, achat d’une 203 neuve immatriculée en TT, puis Saint-Jean Cap Ferrat, où nous allions vivre des mois au camping. Quel bel été j'ai passé là... … Avant que Papa ne trouve un logement (quand je dis logement… c’était plutôt une remise à carrioles à retaper), Boulevard Mantéga-Righi, à Nice…

………………..

   

25 juin 2021

Mémoires et radotages (353) – La vie de Papa – complément n°1

 

GSM

Écrit le 25 juin 2021

A l’attention de mon frère, ma nièce et de mes trois enfants.

Je vous envoie cette clé USB qui contient tous les éléments que j’ai sur Papa et Maman (Papy et Mamie)… C’est peu, mais c’est tout ce que j’ai. Je m’aperçois qu’il y a des lacunes, des ‘trous’, dans l’histoire de Papy que je vais essayer de combler très partiellement…

A rajouter à la fin du récit sonore de l’enfance de Papy :

Il est allé à Paris, pour travailler comme, comment dirais-je, comme boniche mais homme…

Puis il est allé dans les Vosges travailler comme bûcheron, travail pénible mais bien mieux rémunéré… Il m’avait décrit ce travail et si vous voulez savoir en quoi il consiste, il vous suffit de regarder le film « Les Grandes gueules » de Robert Enrico avec Ventura et Bourvil…

Les outils étaient la hache, la scie de bûcheron que l’on maniait à deux, les coins, les cordes, les chevaux et la schlitte  https://fr.wikipedia.org/wiki/Schlitte, … Il ne faut pas oublier que c’était dans les années d’avant guerre (alors que le film lui se passe bien après guerre)

Ensuite il est rentré à Cherbourg, là où son futur régiment était basé, appelé pour faire son service militaire où il fut incorporé le 4 novembre 1938…

Hélas à peine démobilisable, il ne l’était plus, c’était la drôle de guerre et il « partit aux Armées » le 6 avril 1940. Sur le front en Belgique à Godine et Annevoie-Rouillon, comme je l’ai raconté dans « une défaite programmée » d’après le récit qu’il m’en fit en 1994… A lire…

………………..

Je n’ai jamais terminé ce récit… j’en étais resté à l’extermination de la troupe avec laquelle il se repliait…

Or donc, des centaines d’hommes mitraillés dans un champ (je n’ai jamais pu trouver la localisation)… Ils étaient cinq survivants dont mon Papa…

Par où passa-t-il ? Je ne le sais pas. Toujours est-il que ce fut chacun pour soi… Les Troupes Allemandes progressant aussi vers le sud, il parvint avec grande difficulté à leur échapper, rejoignit une première unité de ‘vétérans’, comme on dirait maintenant, qui se repliait. Il fut donc incorporé au 21è BCA (je n’ai jamais su ce qu’était cette unité, Chasseur Alpins, artillerie ???), le 20 mai 1940 à Santilly ou Lantilly (les deux villes existent mais la majuscule est mal écrite. La première est située en Saône et Loire et la seconde en Côte d’or)… Mais dès qu’un side-car Allemand se pointât au nord, ces soldats Français de réserve qui ne voulaient pas se battre, menacèrent de leurs armes mon père qui voulait commander aux tireurs d’élite de l’unité de mettre en joue l’ennemi… Papa leur dit qu’il ne jetterait pas ses armes et qu’il continuerait le repli pour poursuivre le combat et que ces ‘courageux’ n’avaient qu’à lui tirer dans le dos. Ils ne le firent pas, mais tout ce régiment jeta ses armes et se rendit à une avant-garde de deux soldats Allemands… pendant que Papa se sauvait vers le sud… Seul parmi les réfugiés qui fuyaient les combats.

Le repli de Papa ? il alla à pied, en vélo, trouvé sur les bords des chemins, en autocar, enfin tout ce qu’il pouvait trouver… Je crois avoir compris qu’il avait quitté la vallée du Rhône trop bombardée à son goût… Peut-être passât-il par Le Puy en Velay, mais je n’en suis pas certain… Il trouva une moto et parcouru quelques kilomètres (le réservoir troué ne lui donnait pas d’autonomie)… Quand il fut retraité, pendant ses vacances avec Maman, Papa m’a dit avoir retrouvé la ferme devant laquelle il avait abandonné la moto.

 

Pendant son repli, la consigne qui était une véritable rumeur était de se rendre à Pamiers où l’armée Française serait reconstituée et donc il s’y dirigeait… Mais quand l’armistice fut proclamé, l’objectif n’était plus de mise, il était parvenu à Toulouse le 27 juin 1940 où il fut affecté au 14è RI le 4 août 1940, puis il fut affecté au 2è RCC le 7 août 1940. Puis on le fit refluer vers Nîmes via Carcassonne et Montpellier où il fut affecté au 7è RCC (Escadron EME) le 1er septembre 1940… … En 1970, il me montra la fenêtre de sa chambrée dans cette caserne de Nîmes…

Quand ses supérieurs connurent son odyssée, mon père fut envoyé en permission, je dirai même en vacances à l’hôtel Méridien à Saint Raphaël (qui avait probablement été réquisitionné) où il passa un hiver 1940-1941, comme un coq en pâte… Et comme il n’avait pas de colis (orphelin), des sous-offs lui ont donné un peu de leur solde…

Revenu à la caserne de Nîmes, on le mit dans un « coup », qui consistait à partir avec des aviateurs en Afrique du nord pour continuer le combat… Le jour dit, Papa arriva en retard à l’aérodrome à cause de la désorganisation des transports en communs… Quelqu’un lui dit de se barrer, les candidats au départ ainsi que les pilotes avaient été arrêtés par la gestapo (La zone libre était déjà contrôlée par les Allemands en fait !)

Il a été démobilisé et « renvoyé dans ses foyers le 16 juin » (je suppose 1941) et rayé des contrôles…

A suivre

…………………

   

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10 février 2021

Mémoires et radotages (151) – Le 8ème Régiment d’Infanterie Motorisée


GSM

Grâce au récit fait par mon père, j’ai eu l’honneur de compléter, sur Wikipédia, l’histoire de cette unité pour la période de 1940. Ce régiment était celui où a principalement servi mon père sur le front Belge en pleine attaque Allemande : 
 
Seconde Guerre mondiale
 
1940 
 
Le 8e régiment d’infanterie est un régiment d'active, arrivé à Cherbourg en 1930 en remplacement du 1er régiment d'infanterie coloniale. Commandé par le colonel Jeanzac au moment de la mobilisation, puis par le capitaine Loison à partir du 14 mai 1940. Sa devise est « Toujours en avant ».
 
Dans la nuit du 10 mai 1940, l'unité (environ 2 500 hommes), rattachée récemment à la 5e division d'infanterie motorisée, (IIe corps d’armée, 9e armée, groupe d'armées no 1), fait mouvement de Givet vers la Meuse belge en application du plan Dyle, la 5e DIM devant défendre le fleuve entre Dave et Anhée.
 
Le régiment se retranche à l'ouest et à l'Est de la Meuse, dans les villes de Annevoie et Godinne. Il inflige de lourdes pertes aux Allemands (vraisemblablement les 12 et 13 mai) qui veulent s'emparer de la passerelle enjambant la Meuse. Après deux jours de combat, le reste des éléments à l'Est, repasse la Meuse. Les 2 000 hommes valides tiennent la Meuse sous leur feu depuis Annevoie (14 mai 1940). Les assaillants allemands renonceront à emprunter la passerelle de Godinne (que les Français feront sauter), préférant profiter de leurs têtes de pont plus au sud (voir bataille de Dinant).
 
Se sachant en cours d'encerclement par le Sud, le plus gros de la troupe du 8e RI commandé alors par un lieutenant, sans communication, ni approvisionnement, se replie, non sans constater qu'à l'arrière, l'artillerie française avait été neutralisée par les commandos ennemis. Dans leur repli, ils tombent sur un convoi de camions aux couleurs belges (vers le 15 ou 16 mai 1940 environ) et se précipitent, joyeux, vers eux. En fait ces camions avaient été capturés par les Allemands. Cette partie du 8e RI est exterminé l'arme à la bretelle, victime de cette méprise, par l'infanterie, puis l'aviation adverse. Le lieu du massacre (un champ), n'est pas connu à ce jour. Il y aura quelques survivants, dont mon père, jamais recherchés et dont le récit aurait pu renseigner l'histoire de la fin du régiment.
 
Certaines unités dispersées repliées par d'autres chemins sont capturées par l'ennemi. Le régiment est dissous le 22 mai 1940. D'autres unités en retraite dispersée sont incorporées dans le 236e RI le 27 mai 1940.[réf. souhaitée]
3 septembre 2020

Mon nouveau blog qui remplace celui qui a été supprimé

15 février 2017

1940 Une défaite programmée - 15 mai 1940

GSM1

Ce 15 mai dans les Ardennes, c’est un jour qui est gravé dans ma mémoire jusqu’à la mort…
 
Pendant 40 ans, mon fils, mon cerveau a effacé, oui, effacé cette journée et toutes celles qui ont suivi…
Ces journées d’horreur, me sont revenues il y a peu et j’ai voulu affronter leur souvenir…
Avec ta mère, nous sommes allés sur place… Je suis allé revoir ces lieux douloureux…
Oui, je revois, ce 15 mai…
 
Le matin de ce jour là, nous avions peu dormi, fatigués, mais décidés à rejoindre le front. Nous ignorions alors qu’il n’y avait plus de front.
Nous gravissions les raidillons et descendions des collines, l’une après l’autre, quand, au sommet d’un champ de blé, nous distinguons un convoi de camions militaires…
 
Nous faisons mettre en joue par les tireurs d’élites, tandis que l’ensemble du régiment se plaque au sol…
Le lieutenant observe avec ses jumelles… Il les lâche et s’écrie «  Ne tirez pas. Ce sont des alliés Belges ! »…
Au loin nous distinguons le convoi qui s’arrête…
 
A l’ordre du Lieutenant, nous nous relevons tous, mettons nos armes en bandoulières et nous élançons vers le convoi.
Nous courons joyeux vers nos alliés, en criant, « Attendez-nous ! Faites nous une petite place ».
Les cris de joie fusent, tandis que nous courons à perdre haleine…
 
Au loin, j’aperçois les soldats Belges qui descendent de camion pour nous accueillir…
Ils descendent dans le fossé. Ils doivent en profiter pour aller pisser…
 
Nous nous rapprochons vite, mais soudain, des coups de feux claquent.
Mais qu’est-ce qu’il leur prend à ces Belges ? Ils nous prennent pour des Boches !
« Ne tirez pas ! On est Français ! ». Les tirs deviennent un vrai mitraillage. Des camarades qui couraient près de moi tombent. Certains s’arrêtent hésitent, chancèlent, tombent dans des gerbes de sang… Je n’ y comprends rien… Je continue à courir, tellement tétanisé, que je ne sais pas quoi faire d’autre. Mourir par des tirs amis, quelle bêtise la guerre !
 
Il n’y a plus personne autour de moi. Le Lieutenant est tombé lui aussi… devant moi ; une ligne de fumée des tirs Belges s’élève du fossé qui borde la route. Plus je suis terrifié, plus je cours, en pensant que peut-être je passerai plus facilement entre les balles.
Arrivé près du fossé, emporté dans mon élan, je saute par-dessus les hommes allongés l’œil rivé à l’œilleton de leur viseur. Je franchis d’un bond ce fossé et traverse la route entre les camions arrêtés.
Je saute l’autre fossé et m’enfuis vers le bois tout proche.
 
Je m’affale derrière le premier arbre venu.
Je réalise soudain, que l’uniforme des soldats qui nous mitraillent est Allemand. Je les ai vu de près. Uniforme verdâtre et non kaki marron comme les Belges…
Epuisé, je regarde néanmoins, le nez au raz des racines…
 
Les camions, sont aux couleurs du drapeau Belge. Le massacre continue…
 
Je vois au loin, quelques hommes qui s’enfuient, d’autres qui tombent fauchés par les mitrailleuses ennemies…
J’espère que certains ont eu l’idée de se coucher pour éviter d’être tués…
J’ai la gorge nouée de voir mes camarades exterminés. Un sentiment de colère, de désespoir et de frayeur m’envahit. Je me couche derrière l’arbre. Un tremblement secoue tout mon corps. Mes dents s’entrechoquent. Je ne peux rien réprimer…
 
Cela dure longtemps…
J’entends les tirs cesser, puis les rires des Allemands, dont je reconnais les accents gutturaux…
 
Je ne bouge toujours pas. Je ne peux pas. J’écoute, tout ce que je parviens à faire c’est d’écouter. Je me dis que s’ils venaient pour me tuer, je ne pourrais même pas me défendre… Tant pis !..
Mes amis, mes copains, sont morts, alors, pourquoi pas moi, après tout ?
 
J’ai peur de mourir, mais mes muscles ne répondent pas, mes yeux ne voient plus. J’entends seulement…
 
Combien de temps se passe –t-il ? Je ne sais pas. J’entends des avions passer en rase-mottes et qui mitraillent. Ils passent et repassent plusieurs fois, dans les deux sens et mitraillent le champ où mes camarades sont allongés, vivants ou morts. Un tel acharnement…
 
Un autre convoi de camions arrive et s’arrête nez à nez avec le précédent…
Les hayons s’abattent. D’autres soldats en descendent… Des ordres retentissent… Des tirs isolés…. Les voix qui s’éloignent…
 
Ils sont probablement en train d’achever les blessés…
12 février 2017

1940 Une défaite programmée - 14 mai 1940

GSM1

Après de brèves discussions entre les sous-offs et le lieutenant, l’avis général est de nous replier vers l’ouest, toute autre direction étant suicidaire. Il nous faut regagner la France, dépasser la progression Allemande, afin de rejoindre les nôtres pour poursuivre le combat.
Le Lieutenant prend la décision finale. Nous avons tôt fait de donner les ordres de départ.
Cependant, certains groupes ne nous suivront pas, car ils préfèrent emprunter leur propre chemin, quitte à désobéir au lieutenant. Celui-ci accepte, car après tout, ils ont peut-être raison... 
 
Le 8ème R.I., du moins ce qu’il en reste, est en ordre de marche et prêt à se battre de nouveau.
Je me dis quand même que nous n’avons pas beaucoup de munitions.
 
La charrette remplie de culasses de canons antichars, ralentit notre progression. Nous détachons le mulet et renversons la charrette dans le fossé.
 
Nous pouvons enfin continuer, à travers la campagne et les bois, plutôt que sur la route où nous étions vulnérables…
Nous marchons en ordre dispersé, avec des flancs gardes… Tout se passe bien…
Certes, quand des moteurs d’avions se font entendre, nous nous aplatissons  au sol…
Certes pendant notre progression, nous percevons au loin, des volutes de fumées, l’écho des tirs et explosions…
Nous sommes tendus et l’atmosphère, parmi les hommes est plus à la revanche, que l’on pense certaine et proche, qu’à l’effondrement. Nous voulons faire payer aux « doryphores », le prix qu’il faudra.
(Nous sommes à ce moment, loin de penser que la situation est à ce point catastrophique).
 
A plusieurs reprises, nous franchissons des routes. C’est à chaque fois avec beaucoup de précautions. Nous postons des tireurs d’élites. Les hommes traversent par vagues successives en courant pour aller se fondre dans les bois alentours…
 
Mais à chaque fois, pas d’Allemand, pas âme qui vive, d’ailleurs…

 

Je n’en suis pas mécontent et je pense de plus en plus que nous sommes en posture de sortir de la tenaille qui se referme sur les troupes Françaises…
 
Bientôt, nous les raccompagnerons en Allemagne, ces putains de Boches !
 
Quelques combats aériens qui se déroulent très haut dans le ciel, l’épave d’un avion Allemand dans un champ brûlé, nous renforcent dans cette idée…
 
Ce qui m’inquiète le plus ce sont ces quelques chasseurs ennemis qui passent en rase-mottes…
On a beau se faire tout petits…1500 hommes… Est-ce que cela peut passer inaperçu ?
Dans des fermes désertées, nous nous servons en nourriture, eau, vin et reprenons notre route.
Nous avons depuis longtemps jeté nos capotes, nos objets inutiles, si lourds à porter et retroussé nos manches…
Nous ne faisons pas de grandes poses, car nous savons que notre vie dépend de notre rapidité.
Aussi, lorsque la nuit vient, nous continuons notre marche. L’allure est plus lente, bien sur, plus hésitante, plus prudente…
17 janvier 2017

1940 Une défaite programmée - 13 mai 1940

GSM1

Le lieutenant organise derechef, des patrouilles. Il envoie un détachement pour garder le pont sur la Meuse qui est notre sauf conduit pour nous replier en cas de besoin.
Il prend quelques hommes dans chaque compagnie pour sécuriser l’accès du village par la route sur nos flancs arrière gauche et arrière droit.
 
Pendant ce temps le combat continue au sud. Le bruit s’intensifie. Dès la nuit tombée, nous apercevons les éclairs des explosions et la lumière des incendies.
Je comprends que les combats se sont déplacés vers l’ouest. Je me demande si nos troupes ne sont pas en train de céder et surtout si nous n’allons pas être encerclés.
Je vais voir le lieutenant, non sans m’être assuré de la vigilance des guetteurs.
Nous n’avons pas d’ordre de repli. Il nous faut tenir ici.
La nuit est illuminée par les combats. Le bruit des explosions et des tirs nous parvient.
Ceux qui ne sont pas de garde jouent à la belotte, aux dés, ou boivent un quart de rouge.
Je suis assez perplexe sur la suite des opérations. Je ne parviens qu’à somnoler par intermittence.
 
Au petit matin du 13, nous sommes plus fatigués que reposés.
L’aviation allemande vient à nouveau attaquer au sud de notre position à environ trois à cinq kilomètres.
Ceux d’en face ouvrent le feu sur nous. Ils se sont installés et nous mitraillent, accompagnés par des tirs d’artillerie.
 
Le lieutenant nous fait éparpiller, afin de compliquer la tâche de l’ennemi.
Soudain, pour la première fois, nous voyons des explosions de produire en face de nous.
 
Nous avons de l’artillerie derrière nous qui nous soutient ! Nous poussons des cris de joie : « Tiens v’la pour vous sales boches !», « Ah, y z’en mènent plus large les fridolins ! ».
Effectivement les tirs d’armes légères ennemis ont cessés.
Marcel boit goulûment une bouteille de mousseux s’interrompant juste pour dire « Encore une que les boches n’auront pas ! ».
 
Toute la journée les combats qui ont lieu sur notre aile sud font rage. Nous ne distingons pas les combattants cachés par les collines Ardennaises.
Je comprends qu’insensiblement les combats se déplacent en arrière de notre front.
Donc notre front recule. Cela n’est pas très bon pour nous.
Notre artillerie a cessé de nous couvrir. Les allemands se sont déployés jusque sur nos flancs heureusement adossés à la Meuse. Et s’ils la traversent ? Nous sommes pris dans la nasse !
Cette pensée me préoccupe, tandis que nous avons tous rejoins nos postes et que nous répondons aux tirs ennemis.
Je reçois l’ordre de ménager les munitions. Nous passons alors notre temps à nous protéger, pendant que l’ennemi redouble la virulence de ses tirs en toute impunité…
Mais que fait notre artillerie ? Maintenant qu'on en a une pour nous soutenir, je ne comprends pas pourquoi elle ne le fait plus… A moins qu’elle se soit repliée ?
 
Les morts et les blessés ne se comptent plus. Il y en a partout.
J’ai peur qu’une attaque allemande, imminente, nous soit fatale.
 
De temps à autre je fais ouvrir le feu, pour montrer aux ennemis que nous sommes toujours un obstacle.
Le lieutenant n’a plus depuis des heures de contact téléphonique avec l’arrière. Sûrement l’artillerie allemande…
En fin d’après-midi, je suis informé de nous tenir près à faire retraite par le pont sur la Meuse que le génie fera sauter. Nous recevons des instructions pour nous replier unité après unité et notre nouvelle position sur la rive ouest du fleuve.
 
Nuit du 13 au 14 mai 1940
 
Je vais voir le lieutenant. « Que va-t-on faire des canons antichars, mon Lieutenant ? »
Il réfléchit un bref moment…« Vous avez raison on va les laisser là. Je vais faire démonter toutes les culasses, afin que l’ennemi n’en profite pas. Faites le faire de votre coté. Je donne des ordres pour les autres compagnies »
 
Nous avons donc rempli une charrette de culasses de canons antichars. Puis nous l’avons attelée à deux mulets, loin dans le village, à l’abri du mur du cimetière.
 
Quel gâchis ! On nous a doté de canons antichars dernier cri, sans nous instruire au maniement et sans nous donner d’obus. De plus nous n’avons vu aucun char ennemi, fort heureusement pour nous !
Comment gagner une guerre dans de telles conditions ? Enfin pour le moment cela se passe plutôt pas trop mal. Si vraiment nous sommes en plein dans l’aile nord du dispositif d’attaque ennemi, nous résistons à leurs assauts de puis trois jours. Lorsque les renforts viendront, on leur foutra sur la gueule !
 
A la nuit venue, nous appliquons les instructions du lieutenant. Nous nous retirons échelon par échelon, en empruntant le chemin le plus court vers le pont sur la Meuse.
 
Je suis avec le dernier groupe de mes deux sections et nous sommes chargés de la mitrailleuse démontée, lorsque les allemands attaquent sans prévenir.
C’est la course la plus folle que j’ai pu faire. Chargés comme des bourricots, nous peinons à courir vers le pont avec une seule idée en tête, que les boches soient prudents et ne nous rattrapent pas. Nous traversons le pont avec les derniers autres groupes du dernier échelon. Tous courent, tous ont vu les boches. Nous achevons de franchir le pont lorsque les premiers tirs retentissent dans notre dos. Le sifflement des ricochets nous donne des ailes.
 
Lorsque nous sommes à l’abri, couchés à terre, les poumons me brûlent. Je crois que je vais mourir d’étouffement. Nous n’avons plus de force et nous peinons à reprendre notre respiration. Pendant de longues minutes nous ne pouvons qu’entendre la fusillade que nos camarades échangent avec l’ennemi. Le lieutenant avait fait ouvrir le feu dès notre arrivée sur la rive ouest.
 
Lorsque j’ai repris mon souffle le lieutenant me demande de venir avec lui pour brancher une ligne de téléphone. Je prends deux hommes et après avoir récupéré les bobines de fils nous partons courbés vers la route…
 
Nous progressons dans le fossé. Après avoir parcouru un kilomètre il faut se rendre à l’évidence : Les fils sont coupés à chaque poteau mais tous les poteaux sont debout. Des commandos de sabotage allemands ont du passer par là.
 
De retour à notre unique ligne de défense, nous savons que nous ne pouvons pas demander de secours.
Nous n’aurons pas non plus d’unité du génie pour faire sauter le pont. Il sautera pourtant, grâce à des soldats surmotivés !
 
Les tirs ennemis cessent avant l’aube. Le lieutenant a fait envoyer un groupe de reconnaissance sur la route que nous avons empruntée tout à l’heure.
Il paraît que nous avons perdu 500 hommes environ soit le quart de notre effectif.
Nous avons du abandonner tous les blessés qui ne pouvaient pas marcher aux mains de l’ennemi…
 
Le lieutenant réunit les chefs de sections. Nous sommes informés de la situation. Le groupe de reconnaissance a découvert les servants de la batterie de 105mm égorgés, les culasses des canons détruites à l’explosif… Ils ont constatés des combats plusieurs kilomètres en arrière du front initial.
 
Il n’y a plus de troupe Française sur nos arrières et nous risquons bien d’être encerclés par l’Ouest.
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